Les fantasmes
Penser le désir sans se juger
Pourquoi a-t-on des fantasmes ? Faut-il les réaliser ? Et certains seraient-ils « problématiques » ?
Bonne nouvelle : non, votre imaginaire n’est pas un tribunal. Et vos pensées érotiques ne sont pas des délits.
L’imaginaire comme muscle du désir
Un fantasme, c’est une image intérieure du désir.
Une pensée, une scène, un éclat de curiosité que le corps traduit à sa manière.
Certains sont tendres, d’autres transgressifs, parfois absurdes — tous participent à la vie psychique du désir.
Les fantasmes ne disent pas « ce que nous voulons faire », mais ce que notre inconscient tente d’explorer.
Ils ouvrent un espace où la sexualité n’est pas limitée par le réel, la morale ou la peur du jugement.
Avoir des fantasmes ne trahit pas une insatisfaction : c’est un signe de vitalité du monde intérieur.
Ne pas en avoir n’est pas un manque non plus : chaque corps, chaque psyché, a sa manière de se relier à l’érotisme.
Les fantasmes ne sont pas des fautes
Un fantasme, en soi, n’est jamais dangereux. Il ne blesse personne tant qu’il reste une projection mentale.
Le cerveau est un espace d’expérimentation sans conséquence : on y joue avec les interdits, les inversions, les pouvoirs.
Imaginer n’est pas agir. Fantasmer la transgression, c’est parfois une manière de la désamorcer.
Certaines représentations peuvent toutefois devenir envahissantes — lorsqu’elles tournent en boucle, génèrent de la détresse ou de la honte.
Dans ces cas-là, en parler permet de comprendre ce qui se rejoue derrière l’image : une peur, une mémoire, un besoin de contrôle ou d’abandon.
Fantasme du viol : comprendre sans juger
C’est un des plus mal compris.
Avoir un fantasme de contrainte, de domination, de « viol consenti », ne signifie ni vouloir être violent·e, ni vouloir subir une agression.
Ce fantasme parle souvent de pouvoir, de lâcher-prise, d’interdit, pas de crime.
Il rejoue des tensions entre vulnérabilité et sécurité, entre désir et interdiction sociale.
L’imaginaire érotique n’est pas une prise de position politique : il est tissé de contradictions.
On peut être féministe et fantasmer la soumission.
On peut défendre l’égalité et rêver de domination.
Le désir n’obéit pas aux lois du discours, il suit d’autres logiques — souvent celles du corps et de l’histoire intime.
Réaliser un fantasme
Certains fantasmes gagnent à rester dans la tête, leur force vient justement de leur impossibilité.
Dans le réel, les maladresses, la gêne, la fatigue viennent parfois dissiper la magie — et c’est très bien comme ça.
D’autres peuvent être vécus, à condition de respecter trois principes fondamentaux :
Le consentement clair et enthousiaste : rien n’est implicite.
Le respect du cadre légal : la transgression n’a de sens que dans la sécurité.
La communication avant, pendant, après : l’érotisme ne se devine pas, il se co-construit.
Pour les pratiques plus intenses (BDSM, jeux de domination, scénarios), on prévoit un mot de sécurité, on parle des limites, on pense l’aftercare — ce temps de soin et de réassurance qui suit l’expérience.
Hygiène, santé, responsabilité
Le plaisir n’exclut pas la prévention :
préservatifs, lubrifiants, dépistages réguliers, PrEP si besoin.
Les sextoys se lavent, les mains aussi.
Ce n’est pas du puritanisme, c’est du respect mutuel.
Prendre soin de son corps, c’est prendre soin du plaisir.
En résumé : ton imaginaire t’appartient
Nos fantasmes ne nous définissent pas. Ils ne sont pas des aveux, encore moins des actes en soi, mais des métaphores de notre désir. Ils peuvent changer, s’estomper, revenir. Leur fonction n’est pas de dire qui nous sommes, mais d’indiquer ce qui nous traverse.
Il n’y a rien à prouver, rien à corriger.
L’imaginaire est un langage — parfois brouillon, parfois flamboyant — mais toujours légitime.
Pour en parler
Les fantasmes ne demandent pas forcément à être analysés ou “corrigés”.
Mais parfois, ils ouvrent une porte vers une compréhension plus fine de soi, de ses limites, de ses zones de plaisir et de peur.
C’est là que le travail thérapeutique a son utilité :
non pas pour normaliser son désir, mais pour l’écouter autrement.
En séance, on parle de ce que le corps imagine, pas de ce qu’il devrait faire.
On explore, sans tabou, les chemins par lesquels le désir cherche à raconter quelque chose.
